Yann Besson explique avec beaucoup de simplicité comment la lutherie a imprégné sa vie.
Les premiers pas vers la lutherie
Plus qu’une révélation, j’ai en mémoire une succession de séquences qui ont jalonné mon parcours jusqu’au métier de luthier tel que je le vis aujourd’hui.
Cette cassette que j’écoutais en boucle
Il y a tout d’abord ce concerto pour guitare et mandoline de Vivaldi que j’ai écouté des centaines de fois.
C’était la seule et unique cassette de musique classique que contenait la maison familiale.
Cette cassette m’a introduit dans l’univers de la musique classique, et dans celui de la musique baroque plus particulièrement.
L’école de musique de Corme Royal
Mes parents qui étaient totalement en dehors du monde de la musique m’ont finalement inscrit à l’école de musique municipale de Corme Royal en Charente maritime pour satisfaire à mon envie d’apprendre la mandoline.
Les instruments enseignés étaient entre autres, la guitare et le violon, mais je découvrais que la mandoline et le violon avaient un point commun : leurs cordes sont accordées de la même façon (sol ré la mi). Elles sont simplement doublées s’agissant de la mandoline.
Madame Simone Mège
C’est le nom de la professeur qui enseignait le violon à l’école de musique. De sa personnalité touchante ou des chocolats qu’elle distribuait volontiers à ses élèves, je m’interroge encore sur ce qui a amorcé les sept années de cours particuliers qui suivirent… à bien y penser, les deux y sont bien pour quelque chose !
J’associe ces années d’apprentissage à du plaisir, et je dois bien avouer que je paressais beaucoup.
Est-ce la raison pour laquelle madame Simone Mège m’a un jour parlé de l’école de lutherie de Mirecourt, voyant plus en moi le luthier que le musicien ? Sa sensibilité lui avait certainement permis de déceler ce que je ne savais pas encore.
Probablement aussi avait-elle fait le lien avec l’atelier de menuiserie de mon père et les nombreuses heures que j’y passais à assembler ou sculpter des objets en bois.
L’atelier de mon père
Je me souviens comme si c’était hier à quel point l’odeur si particulière des bois sciés, rabotés, toupillés ou poncés me touchait. Ma mémoire est positivement chargée de ces effluves de résine, d’orme ou de chêne qui font l’identité d’un atelier de menuiserie ou d’ébénisterie.
Dans ce lieu et aux côtés de mon père, j’ai tissé une relation forte avec le bois et les outils de l’artisan.
Les livres de mon père
L’« encyclopédie Roret » (manuels “Luthier” et “Fabricant de vernis”), ainsi que le « Tolbecque » trônaient parmi les ouvrages techniques édités au cours des siècles passés, et que mon père possédait dans sa bibliothèque. Ces pages me fascinaient et mon professeur de violon en avait peut être eu vent.
Peut être aussi ma mère lui avait-elle raconté le sauvetage in extremis de mon violon que j’allais entreprendre « d’ouvrir » afin d’en explorer l’intérieur ?
Ces livres ont guidé mes premiers dessins d’instrument et mes premiers coups de compas… avec bien sûr, des résultats à la hauteur de mon inexpérience !
L’École Nationale de Lutherie de Mirecourt
J’avais alors quinze ans et le temps était venu de passer les tests d’admission à l’École Nationale de lutherie.
Parmi ces épreuves, l’une d’elles portait sur la perception auditive. Il s’agissait de recomposer un ton à partir de vingt intervalles. Cet exercice peut sembler complexe, mais il était simplement accessible pour moi grâce à mon apprentissage du violon. Si mon travail très relatif ne me permettait pas de jouer de cet instrument avec brio, j’avais du moins acquis la faculté de discerner les notes justes des notes fausses !
Bref, j’étais reçu et les portes de École Nationale de Lutherie de Mirecourt s’ouvraient toutes grandes devant moi.